Imaginez un monde où vous pourriez avoir des orgasmes aussi rapidement qu’un verre d’eau. Après tout, ne serait-il pas plus facile de se libérer de cette pression inutile ? Y arriver, ne pas y arriver, y arriver ensemble, se donner du mal, n’être pas certain du résultat, être doué ou pas, … Toutes ces questions disparues au profit d’une félicité aussi certaine qu’une date de livraison Amazon. Ce monde peut vous paraitre enviable. Mais … réfléchissez-y à deux fois.
On nous avait promis des voitures volantes pour l’an 2000. Même avec retard, certains continuent d’y croire. Il est cependant plus probable que l’invention la plus révolutionnaire dans la vie quotidienne sera la possibilité de déclencher à l’envie autant d’orgasmes qu’on le souhaite, pour soi-même et peut-être pour les autres.
Finis les problèmes, finie l’expérience, finie l’incertitude. Un simple bouton, une appli sur le smartphone et bim ! Les yeux qui se révulsent à volonté entre deux rendez-vous pénibles au boulot.
La sextech ou la fin des délices ?
Notre perte viendra-t-elle de la sextech ? Les perspectives semblent dans un premier temps plutôt souriantes. Ou du moins c’est ce que semble penser Justin Lehmiller, psychologue social et chercheur à l’Institut Kinsey de l’Université de l’Indiana. Lehmiller, qui est également l’hôte du podcast ‘Sex and Psychology’, a récemment accordé une interview au Wall Street Journal dans laquelle il a expliqué certains développements fascinants (ou inquiétants, c’est selon) de l’avenir du sexe et comment nous vivrons ce pan de nos existences dans quelques années.
Selon Justin, chacun pourra (se) déclencher des orgasmes par simple pression sur un bouton. Il nous rappelle que des chercheurs travaillent actuellement à implanter des électrodes près de la moelle épinière. Il affirme que cette technologie pourrait aider les personnes handicapées ou qui ont du mal à atteindre le plaisir (vous le voyez arriver l’argument inclusif qui fait comme si les perspectives de profit n’étaient pas la seule raison de ces recherches ?).
Comme souvent, celui qui s’oppose ou ose interroger l’intérêt d’une telle avancée passera pour au mieux pour pisse-froid ou au pire pour réactionnaire. Mais enfin, les conséquences d’une telle possibilité paraissent sans fin et, sur le long terme, délétères.
Tout d’abord quelle limite d’âge imposer ? Comment gérer la frustration d’une relation avec un autre être humain, quand le plaisir est à portée de doigt ? Toujours moins d’efforts, toujours plus de centrage sur soi. L’époque s’acharne à nous isoler, nous force à ne considérer que nous mêmes et notre plaisir. Comment résister à ce solipsisme érigé en mode de vie obligatoire ?
Plutôt que d’essayer de cultiver des expériences sexuelles épanouissantes (et chacun s’accordera à reconnaître que c’est difficile), nous irons vers la facilité. Évidemment. Et nous appuierons de plus en plus fort sur ce fichu bouton 🙂
C’est progressivement une grande partie de la littérature et de la description des émois et des tourments humains qui deviendra inaccessible à une génération élevée dans un monde où rien de ce qui fait l’autre et ses désirs propres ne la concernera.
Commentaire sur “Vers l’overdose d’orgasmes … ?”