Les attitudes essentielles d'un bon design thinker ?

Design thinking, les attitudes essentielles à adopter

Pour devenir un « bon » design thinker, un bon designer, il ne suffit pas de suivre des milliers d’heures de cours ou de collectionner les outils et les méthodes : il faut adopter les bonnes attitudes du design thinking. Bien sur il faut en connaître les outils et les méthodes, il faut pratiquer beaucoup, multiplier les expériences, … mais au-delà de tout, il faut avoir une « attitude de designer ». Quelles sont les principales caractéristiques de cette attitude ? Tous les designers sont-ils concernés, y compris les débutants ?

Attitude matters

László Moholy-Nagy, A 19 1927
László Moholy-Nagy, A 19 1927

Le design est une attitude, un comportement face au monde et à la nouveauté. Cette idée n’est pas nouvelle et on  peut par exemple la retrouver dès 1937, année où le peintre hongrois László Moholy-Nagy, émigré aux États-Unis, fonda une école de design à Chicago : le nouveau Bauhaus. Ce Bauhaus de Chicago a eu une influence importante dans les domaines du design et de la photographie. Tout comme le Bauhaus original en Allemagne, l’école de Chicago a combiné compétences techniques et beaux-arts. De nos jours, l’école est connue sous le nom de Institute of Design (ID).
Juste avant sa mort M. Moholo-Nagy donne la définition suivante du design dans le programme de l’école et dans son livre Vision in Motion (1946) :

Le design n’est pas une profession mais une attitude. Le design a de nombreuses connotations. C’est l’organisation des matériaux et des processus de la manière la plus productive, dans un équilibre harmonieux de tous les éléments nécessaires à une certaine fonction. C’est l’intégration des exigences technologiques, sociales et économiques, des nécessités biologiques et des effets psychologiques des matériaux, de la forme, de la couleur, du volume et de l’espace. Réflexion dans les relations. (la source)

Et aussi :

L’idée du design et de la profession de designer doit passer de la notion de spécialiste à celle d’une attitude reconnaissable à son ingéniosité et son inventivité, ce qui permet de voir les projets non de façon isolée mais en relation avec tous les besoins de l’individu et de la communauté.

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Qu’est-ce-que le design thinking ?

L’exemple de l’université de Stanford (ci-dessous) est bien connu et on définit en général le design thinking comme une série d’étapes précises. Stanford en définit cinq mais selon les modèles il peut y en avoir 3, 5, 8 …

Les étapes du design thinking selon l'université de Stanford
Les étapes du design thinking selon l’université de Stanford

L’attitude nécessaire pour la phase d’empathie : être impartial

Se mettre dans la tête de l'autre est plus difficile qu'il n'y parait
Empathie : se mettre dans la tête de l’autre est plus difficile qu’il n’y parait

On le sait, au démarrage d’un projet de conception, il faut comprendre les utilisateurs et l’environnement dans lequel ils sont. C’est la première étape du design thinking. Il ne suffit pas de les observer de près, pendant longtemps. Vous devez comprendre pourquoi ils font les choses qu’ils font, ce qu’ils croient, comment font-ils leur situation, etc. En d’autres termes, il faut aller au-delà des apparences et des évidences. Cela exige que vous mettiez vos propres croyances et préjugés de côté. C’est beaucoup plus difficile qu’il n’y parait. Chacun a son propre cadre de référence. Mais, une attitude impartiale est essentielle pour observer et décrire objectivement la perspective des gens sur le monde. Certains besoins ne sont jamais explicitement exprimés. C’est le rôle du designer de découvrir et formuler des besoins dont les utilisateurs n’ont même pas conscience.

Phase de définition du problème : se focaliser

Pas de pitié pour les problèmes trop touffus
Pas de pitié pour les problèmes trop touffus

La phase « define » du design thinking consiste à redéfinir et à focaliser notre problème, en fonction de ce qu’on aura appris de la phase d’empathie précédente. Après la recherche « sur le terrain », vous avez en effet une compréhension approfondie des besoins des gens. Le problème est que les observations effectuées sont rarement unidirectionnelles et peuvent vous orienter dans plusieurs directions. Il est donc temps de synthétiser vos observations et d’aboutir à une définition claire du problème.

L’idéal est d’aboutir à un problème réel et concret. À ce stade, votre attitude doit être celle d’un élagueur. Il ne faut pas tenter de résoudre trop de problèmes à la fois. Même si le problème très complexe, il faut le reformuler sans cesse jusqu’à aboutir à une histoire simple, facile à comprendre et à partager.

Étape 3 : la génération d’idées. Être optimiste !

Une fois que vous avez une définition claire du problème, vous avez fait le plus gros. Vous pouvez explorer des solutions et chercher à trouver des idées. C’est la troisième phase du design thinking. Le brainstorming règne bien sur en maitre à ce stade mais c’est loin d’être la seule méthode, comme nous l’avons souvent rappelé dans les Cahiers. Quelles que soient les méthodes de créativité que vous choisissez, notez autant d’idées que possible. Soyez optimiste sur la capacité de votre groupe à trouver LA ou LES idées révolutionnaires dont vous avez besoin. Les véritables innovations proviennent souvent des idées les plus folles. Il faut croire à ce stade que rien n’est impossible, embrasser les possibilités plutôt que freiner sur les obstacles. Les étapes suivantes vous ramèneront sur la terre ferme bien assez tôt alors décollez avec optimisme vers des rivages que personnes n’a encore explorés.

Le brainstorming ou remue-méninges

Prototypage. Être confiant

A l’étape d’après, on passe dans le monde physique et on transforme les idées (même les plus folles 🙂 ) en « trucs concrets ». Bien sur il ne s’agit souvent pas de prototypes fonctionnels, qui marchent vraiment. Parfois c’est juste de la pâte à modeler, du papier, des trombones et du cartons, parfois un scénario esquissé sur un paperboard à la façon d’une bande-dessinée. Cette étape du design thinking peut être très ludique. Il s’agit simplement de rendre plus tangible l’idée pour le public visé.

demo or die

devise officielle du MIT Media Lab

Ceux qui ont un peu d’expérience sur le sujet savent qu’il y aura des dizaines, voire des centaines de prototypes réalisés avant qu’ils ne satisfassent ou ne soient compris par les utilisateurs. C’est tout à fait normal. L’échec et la prise de risque font d’ailleurs partie intégrante du processus de design thinking. Il faut donc déborder de confiance dans son idée, surtout au début quand personne dans votre équipe ne semble convaincu par les trois feuilles de papier collées ensemble et griffonnées. Tôt ou tard, vous trouverez la forme appropriée. Partagez vos essais, montrez les avec fierté.

Dernière étape, les tests. Être aventureux

Après le prototypage, vient une étape encore plus difficile du design thinking : le test auprès de « vrais utilisateurs ». En les observant, en les questionnant, en les filmant, … vous apprendrez si votre design si difficilement obtenu fonctionne dans le monde réel. Et chaque fois que vous partagerez votre dernière version avec de vraies personnes, vous serrerez peut-être les dents parce que les réactions des utilisateurs sont rarement aussi enthousiastes ou unanimes qu’on l’aurait souhaité. Mais il n’y a pas d’autre moyen de réussir et d’aboutir enfin à un design qui plaise au plus grand nombre.

Lâcher votre design dans la vraie vie est une aventure, ce qui fait de vous une sorte d’aventurier. Au lieu de chercher de l’or ou un territoire inexploré, vous recherchez de nouvelles opportunités, découvrez ce qui marche et ce qui ne marche pas en situation réelle. Adoptez donc l’attitude d’un aventurier lors du test de votre design avec les « vrais gens ». Vous serez surpris par toutes les nouvelles idées qu’ils vous fourniront. C’est votre or.

Enfin, soyez résilient !

Être designer peut être frustrant. Toujours remettre sur le métier, ne jamais se satisfaire d’un résultat, être capable de remettre systématiquement en cause ce qu’on prenait pour acquis la veille : le designer doit donc être résilient. Il doit pouvoir rebondir facilement face à un « échec » et travailler immédiatement à l’amélioration de son design. C’est en persistant toujours face à l’adversité, face aux problèmes, que le succès arrive.

Le design thinking pour tout le monde ?

La bonne nouvelle est que les attitudes évoquées ici sont accessibles à tout le monde. Adoptez ces attitudes et progressivement vous augmenterez vos compétences de designer. Soyez impartial, focalisé, optimiste, confiant, aventureux et résilient. De façon générale, ces attitudes peuvent également vous aider au delà du travail de designer, dans votre vie de tous les jours. Le design thinking, dans son sens le plus large, est la façon dont vous abordez votre environnement et ses challenges, vos relations et ses joies et problèmes. Vous pouvez donc adopter les bonnes attitudes et en faire un art de vivre mieux, en harmonie avec les autres et le monde.

Pour en savoir plus

  • Pour finir cet article, voici une interview de Banny Banerjee, Directeur et professeur à d.School, l’école de design de l’Université de Stanford

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Inspiré d’un l’article de Erwin de Beuckelaer, avec son aimable autorisation.

 

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