Les espaces de communication sont en cours de saturation (TV, presse, display…). Le niveau de prise de parole du client a augmenté de manière spectaculaire, le client est beaucoup plus attentif, beaucoup plus exigeant, beaucoup plus sachant, beaucoup trop abreuvé d’informations.
Un consommateur émetteur – récepteur
Le marketing purement transactionnel ne fait plus recette et l’émergence de l’émotionnel fait la vie dure aux stratèges.
Les clients sont de plus en plus volatiles. 88% des consommateurs sont influencés par la vie en ligne : le discours des marques dans sa verticalité a perdu de son crédit, et le chaland se professionnalise, il fonde désormais ses choix sur les remontées avisées (ou pas) de ses congénères via la toile et les réseaux sociaux.
L’humain dans sa dimension mercantile a changé pour donner naissance à un consommateur hybride, à la fois récepteur et émetteur, immergé et augmenté, pro et profane, inscrit dans des mondes différents mais convergents, au confluent des sphères physique, biologique et virtuelle, du matériel et de l’immatériel, incité à ignorer ses limites une fois connecté.
L’usage fait des réseaux sociaux est une véritable leçon pour les marques. Chacun y fait sa « promo ». Le marketing de soi est devenu un phénomène de société, qu’il soit mis en œuvre dans un contexte professionnel ou à des fins « d’auto promo » dans la sphère privée.
Le résultat de ces élans de promotion de soi sera plus ou moins réussi, toujours est-il que nous disposons tous des outils pour capter la lumière, et qu’en cela, nous sommes tous susceptibles de devenir des faiseurs de roi, LES ambassadeurs des marques.
Véritable manne pour elles, ou véritable piège…
La fin de l’ancien monde ?
Dans ce contexte mouvant et protéiforme, comment une marque/une organisation peut-elle gérer la communication de masse ? Comment peut-elle résister dans un écosystème pratiquement réinitialisé ?
Le lien d’ambassade, l’inbound marketing, le Word of Mouth Marketing sont devenus des principes actifs panachant démarche incitative et horizontalité vertueuse. Ça n’est plus la « boîte » qui fait sa « comm », ce sont ses clients.
Pourquoi se torturer l’esprit à mettre en œuvre des stratégies coûteuses, illisibles, et efficaces sur le court terme, alors que la nouvelle force de vente à développer est celle que le client peut déployer ?
Outre l’évident intérêt de ce modèle économique, il atténue la volatilité des comportements d’achat. Il peut même éviter les errements, ancrer la fidélité dans les territoires via l’incitation à la consommation responsable dans laquelle nous baignons.
En effet, « notre » consommateur augmenté consommera plus volontiers un produit augmenté : chargé en valeurs, en éthique, porteur de solutions, véritable panaché du besoin viscéral d’habiter son corps mais aussi de respecter son âme, le tout mâtiné de vert et d’IOTs bien sûr…
Comprendre cela revient à accepter la fin de « l’ancien monde » et sa renaissance sous forme composite, autour de ses fondamentaux (que sont l’attachement au monde physique et l’amour de soi) et de ses adventices (que sont l’attrait pour la réalité virtuelle et le prolongement de soi).
Il est possible de donner plus que le produit au client et il est possible pour le client de donner plus que de l’argent.
Les réseaux sociaux n’ont en cela pas vocation à vendre mais à communiquer. D’ailleurs, aucune entreprise n’a plus de communicants que de clients satisfaits. Et alors qu’autrefois un client comblé faisait passer le message à quelques personnes, il a désormais une force de réplication infinie via la dentelle synaptique des réseaux virtuels.
La multiplication des espaces et des sites en ligne a momentanément répondu aux attentes d’une société post-industrielle en quête d’efficacité, de temps, de fonctionnel, mais aussi et surtout aspirant à un monde décentralisé et non uniformisé.
Pour innovante et disruptive qu’elle soit cependant, cette approche n’est pas suffisante et la zone dans laquelle nous transitons nous ramène en terre connue, cette zone où confluent toutes les attentes, où s’assujettissent le tangible et l’intangible, le virtuel et le réel, cette zone qui fait de nous des êtres complets, alter et ego, « je » pensant et « je » vivant, cette zone où physique et immatériel renouent, l’un complétant l’autre, cette zone où le e-commerce retrouve son autre moitié, celle que l’on pensait voir disparaître : la fin des magasins physiques n’est plus d’actualité.
L’émergence de la complexité, enfin
La révolution post-industrielle nous a finalement ramenés à la réalité, à cette mitoyenneté pertinente. Le e-commerce et le marketing numérique ont pu un temps faire penser que la page était définitivement tournée, mais l’émergence de cette complexité, a permis de réinvestir ces territoires oubliés : le magasin physique est mort, vive le magasin physique ! Il « suffit » de le réinventer.
Même des pure players comme Amazon, entre autres, l’ont bien compris, en se réincarnant dans des représentations, des prolongements d’eux-mêmes avec Amazon Go. Cette approche « digisique » ringardise le tout virtuel et sert la soupe à ceux qui savent qu’on ne peut faire l’économie d’aucune des dimensions dans lesquelles nous évoluons, à ceux qui savent qu’il faut désormais redéfinir l’expérience client en offrant des parcours stimulants, chimériques, pluridimensionnels, faisant la part belle aux sens, à la curiosité, à la réflexion, au jeu, à l’interactivité, au partage, à l’agilité, aux objets connectés, aux technologies et à l’humain.
C’est l’expression d’un tropisme qui nous prédispose à être et à faire, à donner et à recevoir. Les enjeux pour demain sont essentiels.
Les marques, les entreprises et les consommateurs doivent se réapproprier et réinvestir la sphère physique mais l’habiter autrement, en reconnaissant la valeur de la nouveauté et la permanence de la nature, leur part d’ombre et de lumière, leur sensualité et leur immatérialité, leurs besoins et leurs aspirations plus profondes, leurs rêves et leurs peurs.
Que serait l’information sans la connaissance ? La consommation sans l’expérience ? La connexion sans l’existence ? L’action sans la conscience ?
2 commentaires sur “Accepter la complexité dans un monde augmenté”
Bonjour Isabelle,
Merci pour cet article intéressant avec des questions qui font réfléchir.
Il est vrai que le monde se complexifie mais au final le réel besoin des gens reste simple. Je crois qu’un des défis que nous avons dans la création de nouveaux produits ou services c’est justement de faire simple et utile. La réelle connaissance des utilisateurs et de leurs besoins doit nous conduire à ça.
A bientôt,
Laurent Cachalou du blog Innover-Malin
Bonjour Laurent,
Merci pour ce retour. Ces questions sont assurément primordiales et, surtout, représentent un challenge particulièrement intéressant à relever.
A bientôt,
Isabelle