L'innovation impuissante face à l'augmentation de la population

Pollueur payeur. Et si les parents passaient à la caisse ?

En cette fin d’année et devant la surconsommation des ressources de notre planète, il faut nous rendre à l’évidence : nous avons déjà causé notre perte. Nos enfants feront face aux pires désordres écologiques et climatiques que l’espèce humaine aura connus. La plupart des espèces animales auront disparu, dont une grande partie avant même qu’elles ne soient découvertes. Nos descendants se battront pour voir les derniers ours, tigres, éléphants, cétacés, hippopotames ou rhinocéros que nous maintiendront vivants en captivité. Deux problèmes sont la cause de cette situation. Tout d’abord nos modes de vie individuels sont toujours basés sur l’idée que les ressources naturelles sont inépuisables et que nous pouvons les piller sans conséquence. La deuxième raison est très simple : nous sommes beaucoup, beaucoup trop nombreux et le principe « pollueur payeur » n’est pas appliqué.

Le principe pollueur payeur, ou PPP

Pollueur payeur
Manifestation de Greenpeace réclamant l’application du principe pollueur payeur

S’il est un principe qui ne pose aucun problème à l’opinion publique lorsqu’il s’applique aux agriculteurs ou aux industriels, c’est celui du « pollueur payeur ». Ce principe découle de l’éthique de responsabilité, qui consiste à faire prendre en compte par chaque acteur économique les externalités négatives de son activité. Les mesures découlant du principe pollueur payeur ont pour but de rétablir la « vérité des prix » : si une activité entraîne une pollution, le coût de cette pollution qui est supporté par la collectivité devrait être pris en compte au niveau du pollueur. Au sein de l’Union européenne, ce principe figure parmi les principes fondamentaux depuis l’entrée en vigueur de l’Acte unique européen en 1987 dont le titre XIX fonde juridiquement la politique de l’environnement de l’Union, laquelle : « est fondée sur les principes de précaution et d’action préventive, sur le principe de la correction, par priorité à la source, des atteintes à l’environnement et sur le principe du pollueur payeur« . En France, le principe pollueur payeur ou PPP est devenu avec la loi Barnier de 1995 un des quatre grands principes généraux du droit de l’environnement français, avec le principe de prévention, le principe de précaution et le principe de participation.

Malthus avait raison ?

 

courbe de croissance de la population mondiale
Courbe de croissance de la population mondiale

Nos modes de vie consomment un nombre toujours plus élevé de ressources naturelles et provoquent toujours plus de pollution. La prise de conscience est récente mais forte, en particulier dans le monde occidental même si les rechutes, par exemple trumpiennes, sont fréquentes . Nous sommes beaucoup à être individuellement à la recherche d’un modèle de croissance plus respectueux de l’environnement. Sans succès probant pour l’instant. Mais si chaque individu est de plus en plus conscient de la nécessité de ne pas trop abîmer l’environnement, le problème c’est que des individus, il y en a de plus en plus.

Exemple d'une courbe de croissance bacterienne
Exemple d’une courbe de croissance bactérienne

La courbe de croissance de la population mondiale a été exponentielle ces dernières décennies. On ne peut pas ne pas faire le rapprochement avec ce qui se passe dans une boite de pétri ensemencée lorsqu’on observe la croissance d’une population bactérienne. Tout se passe comme si, collectivement, nous étions des amibes et n’avions aucune conscience de la situation dans laquelle nous sommes. On se rend bien compte en observant l’évolution de la population humaine que nous ne pourrons pas maintenir ce rythme très longtemps. Mais nous continuons à faire des enfants malgré tout. Et nos gouvernements nous y encouragent. La question est : que se passera-t-il après cette phase de croissance exponentielle ? Une stabilisation ? Une chute brutale ? Et dans quel monde vivront alors nos descendants ?

Malthus a été le premier à prendre en compte la limite des ressources naturelles à notre disposition. Il en a conclu que la population humaine ne pouvait croître indéfiniment et qu’elle atteindrait un palier, puis y resterait. Contrairement à ce que l’on dit couramment, Malthus n’a jamais prédit son effondrement. Le concept « d‘effondrement » lui était étranger, mais au moins il avait raison de noter que tous les systèmes physiques ont des limites. Et malgré le pessimisme auquel est souvent rattaché le « malthusianisme », peut-être était-il finalement très optimiste sur notre capacité à ne pas rendre notre environnement complètement inhabitable ?

Combien coûte-t-on à l’environnement ?

Il est très difficile d’estimer quel est notre impact individuel sur l’environnement et encore moins de le chiffrer. Cela dépend par exemple de notre âge, de notre mode de vie (en couple, célibataire, avec des enfants, …) et de notre niveau de vie.

Mesurer notre impact environnemental individuel est presque impossible
Mesurer notre impact environnemental individuel est presque impossible

Si on ne tient compte que de notre bilan carbone, qui n’est qu’un de nos impacts sur l’environnement, on peut par exemple affirmer qu’un cadre supérieur émet plus de CO2 qu’un ouvrier et qu’une famille de trois enfants pollue par personne moins qu’un célibataire, selon l’Observatoire du bilan carbone des ménages (si, si, ça existe – et ça a aussi un bilan carbone d’ailleurs). Le bilan carbone global moyen d’un individu en France s’élèverait selon cet observatoire à 7388 Kg de CO2 par an mais, plus on est riche, plus on pollue. Pour les cadres supérieurs, on monte à 8580 Kg de CO2 par an contre 6828 Kg pour un ouvrier. Ce sont surtout les transports de loisirs, et notamment l’avion, qui provoquent cette différence.

Le rapport de l’observatoire fournit une autre information très intéressante : les personnes qui ont la « fibre écolo » polluent presque autant que les autres. Il y a en effet très peu de différence entre les niveaux d’émissions des personnes ayant une sensibilité « médiocre » et celles ayant une sensibilité « moyenne » (respectivement 7555 et 7479 Kg de CO2 par an). On voit donc que diminuer fortement les émissions de CO2 ne peut passer que par des modifications structurelles de nos modes de vie, déplacements, consommation et que les efforts individuels n’ont que des impacts limités.

Pour une application du principe « pollueur payeur » ?

Chaque individu pollue et consomme des ressources durant toute sa vie. Que se passerait-il si le principe du pollueur payeur était appliqué à ceux qui ont directement créé cette pollution : les parents ?

Chaque personne naissant aujourd’hui vivra environ 82 ans. En 2016, nous avons rejeté en moyenne 7388 kg de CO2. Si on imagine une augmentation du rejet de CO2 de 3% par an, on aboutit à plus de 2 500 tonnes de CO2 rejetés sur toute une vie. Pour avoir une idée du « coût environnemental » de la tonne de CO2, nous sommes obligés de nous baser sur les tarifs fixés par les états ayant mis en place une taxe carbone. Il existe à l’heure actuelle une vingtaine de pays ayant mis en place une telle taxe. Son montant varie entre plus de 100 €/t CO2 (pour la Suède) et moins de 0,9 €/t CO2 (pour le Mexique). En France, le montant de la taxe évolue très vite : 14,50 €/tonne de CO2 en 2015 et 30,50 €/tonne de CO2 en 2017. En prenant l’hypothèse d’une inflation annuelle moyenne de 2% et d’une augmentation du coût de la tonne de CO2 de 5% par an, ce qui est très raisonnable, nous aboutissons à un coût total par personne, pour toute une vie, de plus de 439 000 € en euros constant.

Si on demandait aux parents de rembourser cette somme jusqu’à la majorité de leur enfant, cela représenterait 2 033 € par mois dès sa naissance pour culminer à 2 847 € par mois à ses 18 ans.

Et si l’enfant unique chinois avait sauvé la planète ?

Limiter la population humaine, une gageure ?
Limiter la population humaine, une gageure ?

De Harry Harrison (Soleil Vert) à Dan Brown (Inferno), on ne compte plus les œuvres d’anticipation travaillant le thème de la limitation de la population. Aujourd’hui de plus en plus de scientifiques semblent tentés par cette solution. Encore récemment, en pleine COP23 qui se tient à Bonn, 15 000 scientifiques du monde entier ont publié lundi 13 novembre 207 un appel urgent à sauver la planète. Selon eux, la préservation de nos ressources et de notre environnement passe, entre autres, par une limitation de la population. Et que dire de la Suisse, où l’argument écologiste est brandi alors qu’une votation rejetant les étrangers a lieu sur le thème « Halte à la surpopulation – Oui à la préservation durable des ressources naturelles ».

Faut-il demander aux parents 2000€ par mois pour compenser le coût carbone de leur enfant ?Ce blog est consacré à l’innovation et certains d’entre vous auraient sûrement attendu que je m’étende de façon plus positive sur le troisième facteur qui peut nous sauver, à côté du changement de nos modes de vie et de la limitation de la population, à savoir l’innovation et le progrès technique. Malheureusement, je n’ai pas la foi de Pascal Bruckner dans le « génie de l’espèce humaine, capable de dompter ses peurs pour improviser de nouvelles solutions » (le fanatisme de l’apocalypse). Pascal Bruckner vient d’un monde moins tragique sur le plan environnemental que celui qui arrive. Je ne crois pas forcément à l’effondrement de la population humaine que certains redoutent mais je suis persuadé que, si stabilisation il y a -vers 2100-, elle se fera à un niveau insoutenable pour les écosystèmes naturels qui auront à cette date, complètement disparu. Cette stabilisation aura lieu, poussée paradoxalement par l’avènement des modes de vie qui précisément provoquent les désordres environnementaux actuels, mais il sera trop tard.

Il semblerait bien que ce ne soit finalement pas « nos enfants qui paieront nos retraites ».

 

Projections de la population mondiale
Projections de la population mondiale

 

PS : ne m’insultez dans les commentaires de cet article, il s’agit simplement d’un petit exercice auquel je me suis livré. Je ne suis ni « anti-parent », ni « anti-enfant ». Je ne considère pas qu’il faille limiter les naissances en fonction des ressources, ni que les enfants seraient une pollution. Je pense utile que chacun réfléchisse aux conséquences globales de son comportement individuel. Et je fais mon mea culpa aussi …

Pour en savoir plus

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2 commentaires sur “Pollueur payeur. Et si les parents passaient à la caisse ?”